Santé au travail : la CFTC va participer à la concertation
25 octobre 2018 | Social
Le rapport Lecoq-Dupuis-Forest, qui va servir de base à la concertation sur la santé au travail à laquelle va participer la CFTC, préconise de fusionner les acteurs. Si la CFTC est favorable à la rationalisation du système de santé au travail, elle estime que le rapport soulève encore des questions auxquelles la concertation devra répondre.
La CFTC participe en ce moment, comme les autres partenaires sociaux, à des réunions bilatérales sur la santé au travail, avec les ministères du Travail et de la Santé. En fonction de leur issue, elles pourraient se poursuivre par une concertation d’ici à la fin de l’année, puis par une négociation interprofessionnelle durant le premier trimestre 2019, pour aboutir à un projet de loi fin juin. Le Premier Ministre souhaite que le rapport Lecocq-Dupuis-Forest, qui lui a été remis en juillet dernier, serve de base à la concertation.
Ce rapport part du constat que notre système de santé au travail est composé de nombreux acteurs, qui ont en commun d’œuvrer notamment à la prévention des risques professionnels.
Acteur | Tutelle | Missions |
INRS (Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles) | Partenaires sociaux |
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Anact (Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail) | Ministère du Travail |
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OPPBTP (Organisme Professionnel de Prévention du Bâtiment et des Travaux Publics) | Branche du BTP |
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Acteur | Tutelle | Missions |
SSTI (Services de Santé au Travail Interentreprises) | Entreprises |
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Aract (Agences régionales pour l’amélioration des conditions de travail) | Anact |
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Carsat (Caisses d’assurance retraite et de la santé au travail) |
Assurance vieillesse Assurance maladie |
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OPPBTP (agences régionales) | Partenaires sociaux du BTP |
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D’après les auteurs du rapport, les entreprises auraient du mal à se repérer dans ce paysage complexe. Pourtant, le premier – voire le seul – interlocuteur à qui s’adresse l’entreprise, en matière de prévention des risques, et plus largement de santé au travail, est son SSTI. Quant aux autres acteurs, ce sont plutôt eux qui contactent l’entreprise au besoin. Prenons l’exemple des Carsat. Celles-ci viennent à la fois contrôler l’entreprise, si son taux de sinistralité est particulièrement élevé, et accompagner l’employeur dans la mise en place de mesures de prévention.
La CFTC est favorable au guichet unique
Les auteurs du rapport estiment qu’il faut rendre le système plus lisible, et préconisent de fusionner les acteurs de chaque région en une organisation unique : Région Santé Travail (RST). Les RST, via leurs antennes locales, deviendraient ainsi le « guichet unique » des entreprises en matière de prévention et seraient coordonnées, au niveau national, par France Santé Travail (FST), qui regrouperait l’Anact, l’INRS et l’OPPBTP. Ainsi, chaque entreprise aurait accès « à une offre de services homogène sur tout le territoire » :
Acteur | Tutelle | Missions |
FST (France Santé Travail) | Partenaires sociaux, Etat |
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Acteur | Tutelle | Missions |
RST (Région Santé Travail) | Partenaires sociaux, Etat |
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Commentant le rapport Lecocq-Dupuis-Forest, « on relève une volonté de mieux structurer le système », déclare Pierre-Yves Montéléon, responsable confédéral CFTC de la cellule « santé au travail ». Cette idée, il rappelle qu’elle « est défendue par la CFTC depuis plus de vingt ans ». Quant au guichet unique, « on le réclame depuis longtemps », affirme-t-il. Il déplore d’ailleurs que les différents acteurs de la santé au travail ne collaborent pas davantage.
Cependant, la CFTC met en garde contre le risque d’une répartition géographique inégale des moyens dédiés à la prévention. Le « guichet unique », pour être efficace, doit être relayé par des structures suffisamment proches de l’entreprise, comme les SSTI aujourd’hui. D’où le souhait de la CFTC de mailler le territoire en fonction des zones où sont concentrés les emplois et non uniquement en fonction de la carte administrative.
La CFTC veut sanctuariser le budget de la prévention des risques
Le rapport Lecocq-Dupuis-Forest préconise de fusionner la cotisation « accidents du travail maladies professionnelles » (AT-MP) et la cotisation SSTI en une cotisation unique « santé au travail », qui serait prélevée par les Urssaf. La cotisation AT-MP sert surtout à verser les pensions ; une faible part est employée à la prévention des risques (341 millions d’euros). La cotisation SSTI (1,6 milliard d’euros) sert à suivre l’état de santé des salariés et à faire de la prévention.
La CFTC met en garde contre un risque de dilution des sommes utilisées pour la prévention. De plus, dans le scénario proposé par le rapport, les employeurs pourraient recourir à des prestataires privés pour mener des actions de préventions et déduire ces dépenses de leur cotisation « santé au travail ». D’où le risque d’une perte de financements. La CFTC souhaite que les montants consacrés à la prévention soient maintenus et, mieux encore, augmentés, et qu’un budget prévention soit sanctuarisé.
La CFTC veut développer la culture de prévention
Dans le scénario du rapport Lecocq-Dupuis-Forest, les RST accompagneraient les entreprises dépourvues de moyens (les plus petites) pour élaborer un plan de prévention des risques. Celui-ci remplacerait le document unique de prévention des risques professionnels, généralement vécu comme une simple obligation administrative, et la fiche d’entreprise dans laquelle le médecin du travail recense tous les risques professionnels.
La CFTC approuve la proposition d’aider les petites entreprises à développer une prévention des risques. Pour ce faire, le « document unique » conserve, selon la CFTC, toute sa pertinence dans la mesure où il inclut déjà un plan de prévention des risques. Et c’est en s’en emparant que les employeurs pourront améliorer leur niveau de culture en matière de prévention. Quant à la fiche d’entreprise, elle permet d’apporter un regard médical sur les risques professionnels.
Cependant, la CFTC formule plusieurs propositions de mesures visant à développer la culture de prévention dans les entreprises :
- Transformer le document unique en outil de management ;
- Dispenser aux employeurs et aux cadres chargés de la sécurité une formation de deux jours à la prévention des risques ;
- Organiser des formations conjointes employeur/salariés sur la thématique de la santé au travail ;
- Communiquer à chaque salarié, à son embauche et à chaque nouvelle affectation, la partie du document unique relative à son unité de travail.
Laurent Barberon