Manifestations du 18 septembre : à Paris, les militants CFTC mobilisés pour « plus d’équité fiscale » et « vivre dignement de leur travail »
19 septembre 2025 | SocialVisages du syndicalisme
Investie sur tout le territoire ce 18 septembre, la CFTC a évidemment battu le pavé à Paris, au sein de l’intersyndicale. Récit de l’évènement avec quelques militants, qui détaillent les raisons de leur mobilisation ce jeudi.
Crédits photos : Guillaume Blanchon
Ce 18 septembre, la place de la Bastille bouillonne. Il est 14 heures, les drapeaux s’agitent, les slogans pleuvent et les sonos tonnent : l’intersyndicale – qui rassemble plusieurs dizaines de milliers de militants ce jeudi à Paris- peut lentement commencer sa marche, qui mènera les manifestants jusqu’à la place de la Nation, dans le 11e arrondissement de la capitale. Dans le flot de marcheurs du jour, on repère vite l’azur des dossards des militants de la CFTC. Parmi eux, Hamdia, la cinquantaine, venu « pour essayer de faire comprendre au président Macron ce que nous, le peuple, on subit. »
« La retraite ? Autant préprogrammer mon enterrement, ça me coutera moins cher »
Hamdia est employé en région parisienne, dans une entreprise de cosmétiques. Avant, il avait longuement travaillé à Sochaux-Montbéliard, dans les usines Peugeot de l’agglomération, depuis soumises à de nombreuses restructurations. « L’entreprise faisait vivre tout le département…On n’était pas payé rubis sur l’ongle, c’est sûr, mais on pouvait vivre décemment avec ce salaire là. » Pour Hamdia, le cœur du problème est là : « En ce moment, tout le monde évoque la nécessité de taxer les plus riches. Pourquoi pas, mais je pense que la priorité n’est pas là : il faut d’abord que les gens qui travaillent puissent toucher un salaire qui leur permette de vivre dignement, tout simplement ».
Il évoque spontanément sa retraite, à laquelle il pense régulièrement : « On me dit que je vais devoir cotiser jusqu’à 64 ans. Mais est-ce que ça sera encore vrai dans quelques années ? Est-ce qu’un jour, on ne va pas m’expliquer que je vais devoir cotiser jusqu’à 67 ans ? 69 ans ? 71 ans? Qu’on me le dise tout de suite : comme ça, je préprogramme mon enterrement, ça me coutera moins cher. »
« Je suis là pour les boomers »
La retraite, Sonia* vient de commencer à en bénéficier, après avoir travaillé pendant 44 ans. « Je suis là pour les boomers », lance d’emblée cette ancienne employée du secteur de la banque et des assurances. « Ça m’a choquée que François Bayrou cible les retraités…Comme s’ils étaient les grands responsables du laissez-faire budgétaire… Mais qui est coupable de ces erreurs de gestion ? Les citoyens, ou ceux qui pilotent le budget de la Nation ? »
Pour rééquilibrer les finances de l’Etat, elle évoque les 211 milliards d’euros d’aides publiques dont bénéficient annuellement les entreprises, selon les estimations d’un récent rapport sénatorial : « Le problème, c’est que ces milliards d’euros d’aides ne sont pas contrôlés, ni soumis à des objectifs de maintien ou de création d’emplois », regrette elle. Pour elle, il faut aussi davantage solliciter les plus favorisés, afin de mieux financer les services publics et assurer le maintien du modèle social français : « Je suis en faveur de la taxe Zucman, tranche-t-elle. Quand on a plus de 100 millions d’euros de capital, est ce que c’est trop demander de contribuer à hauteur de 2% de son patrimoine ? On ne peut pas laisser les ultra privilégiés se soustraire au pacte social. »
« Il faut plus d’équité fiscale »
Non loin d’elle, Larbi acquiesce « Le français moyen est soumis à un taux d’imposition et de prélèvement de 50 %. Mais pour les milliardaires, ça retombe à 25%. Ça ne peut plus marcher. Il faut de l’équité fiscale. » Pour ce juriste au regard rieur et au verbe facile, « si des efforts budgétaires sont à faire, tout le monde doit prendre sa part, à la hauteur de ses moyens. »
Il cite aussi spontanément l’exemple de Michelin : l’entreprise avait fermé deux de ses sites de production en 2024, tout en percevant parallèlement 140 millions d’euros d’aides publiques et en engrangeant 1.9 milliard d’euros de bénéfices : « L’Etat les aide, et ils ferment des usines en France, en délocalisant. C’est inadmissible ! » S’il déplore la détérioration du contexte social et l’instabilité politique actuelle, Larbi n’est pas résigné pour autant : « Vous savez, moi, je viens d’un pays, l’Algérie, que j’ai dû quitter pendant la décennie noire, il y a presque 30 ans … J’aime mon pays de naissance, mais en France, j’ai trouvé une société que je trouve magnifique, dans sa pluralité, son ouverture, sa solidarité…J’y crois encore, mais il faut que ça bouge. » Avant de lever haut sa pancarte pour rejoindre la tête du cortège de la CFTC, Sonia a un dernier message à faire passer : « Vous savez, moi, je suis Républicaine. Je respecte l’Etat et les institutions. Ce serait bien que les institutions se rappellent qu’elles sont tenues d’en faire autant avec les citoyens. »
Tous propos recueillis par AC
*dans un souci de confidentialité, certains prénoms ont été modifiés