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Pour une protection sociale financée par l’entreprise et le travail

Santé

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D’après le dernier baromètre de l’UCANSS, 85 % des Français disent avoir une bonne image de leur système de protection sociale, 82 % d’entre eux s’accordent à dire que la Sécurité sociale a joué un rôle important dans la gestion de la crise, et enfin 72 % estiment que son action a permis d’amoindrir les conséquences négatives de la pandémie. Un plébiscite fondé sur des prestations qui ont prouvé leur capacité d’adaptation, et qui permettent d’entretenir un haut niveau de confiance en l’avenir – une composante indispensable au dynamisme de l’économie ! Cela pourrait suffire à convaincre les entreprises de vouloir pérenniser leur contribution à son financement. D’autant plus qu’une bonne couverture des risques permet de faire diminuer l’absentéisme et d’instaurer un climat plus serein dans l’entreprise : il s’agit d’un véritable levier de performance.

L’essentiel en 3 minutes  

Un modèle qui marche en temps de crise

Le système de protection sociale a été massivement sollicité au cours de la crise sanitaire. Et ce, dès le début de la pandémie, une crise sanitaire requérant non seulement des soins immédiats et des opérations de prévention, mais aussi une prise en charge visant à compenser ses effets économiques et sociaux. L’ensemble des institutions sanitaires et sociales qui forment notre système de protection sociale a ainsi été mis en branle. La protection sociale financée en partie par l’entreprise et par le travail aura été l’un des piliers du “quoi qu’il en coûte”. Or de ce point de vue, le bilan a été positif. Notre système a su faire face à des risques polymorphes, en proposant des mesures de protection adaptées. Les frontières traditionnelles des risques sociaux ont beau avoir été bousculées, le pays ne s’est pas effondré : la protection sociale a pleinement joué son rôle, et s’est même montrée capable d’innover.

Exemples d’innovations en réponse à la crise

  • Arrêts maladie indemnisés étendus à des objectifs de « prévention » couvrant un certain nombre de « situations à risque » (personnes vulnérables au regard des formes graves du COVID)
  • Arrêts maladie indemnisés à la frontière entre prévention sanitaire et congés pour garde d’enfants, avec la compensation sous cette forme de l’impossibilité pour les parents (un par foyer) de travailler en raison de la fermeture des structures d’accueil de la petite enfance et des établissements scolaires
  • Mise en place de façon massive de l’activité partielle et création d’un dispositif nouveau l’APLD. 

La crise a révélé l’existence de publics plus exposés au risque

Certaines catégories de personnes aux statuts d’emploi fragiles, et notamment certains jeunes adultes et travailleurs non-salariés, sont moins protégées face aux risques sociaux.

Si la couverture des travailleurs non-salariés peut considérablement varier, elle est néanmoins toujours moindre que celle des salariés, en ce qui concerne les dispositifs de soutien au revenu relevant de la sphère sociale. Leur accès à ces dispositifs est limité ou inexistant. Au cours de la crise, ils ont certes bénéficié de toute une série de mesures de soutien à leur activité, mais qui ont pour l’essentiel consisté en  : reports ou exonérations de charges sociales, aides aux très petites entreprises attribuées via un fonds de solidarité, indemnités spécifiques versées aux affiliés du régime complémentaire des indépendants, et même mesures d’aide ou d’action sociale. 

Les jeunes, quant à eux, ont pu se trouver en difficulté en raison des conditions d’obtention des allocations de chômage, mais aussi car le « filet de sécurité » de base que constitue le RSA n’a pas été étendu aux jeunes majeurs âgés de moins de 25 ans (sauf exception).

Notons que ces deux catégories de personnes, particulièrement frappées par la crise, ont pour point commun de ne pas être rattachées à l’entreprise. Constat d’autant plus dommageable que, depuis plusieurs années, on constate une forme d’effritement du lien entre protection sociale et entreprise. Et ce, pour différentes raisons qui ont trait à la structure du financement et à l’évolution de notre système.

Une tendance au désengagement des entreprises ?

La volonté affichée des entreprises de se désengager du financement de la protection se traduit par une demande assez constante de refus d’augmentation des cotisations, voire même de diminution de ces dernières. Cette position a trouvé une traduction politique dans les exonérations de cotisations, qui se sont accentuées ces dernières années, au nom de politiques de l’offre censées stimuler l’économie. Ces exonérations sont en partie compensées par des recettes de nature fiscale : au bout du compte, aujourd’hui, la TVA constitue 14 % des recettes de la sécurité sociale.

Parallèlement, notre système a évolué dans le sens d’une dissociation de la protection sociale et de l’activité professionnelle, dans trois domaines au moins : les allocations familiales (généralisation en 1978), les retraites (minimum vieillesse) et l’assurance maladie avec la création de la PUMA (protection universelle de l’assurance maladie en 2016). 

Ces deux mouvements convergent et semblent esquisser un système beveridgien, caractérisé par une part croissante du financement par l’impôt ou les taxes, et qui profite à un plus grand nombre mais de façon résiduelle (filet de sécurité). Ce parti pris de dissociation n’a toutefois pas concerné toutes les réformes : ainsi, par exemple, l’ANI de 2013, qui généralise la complémentaire santé d’entreprise, renforce le lien entre activité professionnelle et protection sociale. 

Un modèle qui permet la reprise économique !

La reprise imaginée par le gouvernement et les entreprises elles-mêmes n’est rendue possible que par une protection sociale associant activité professionnelle et protection sociale. Pour la CFTC, il importe que la protection sociale se construise ainsi, collectivement, et que l’entreprise y joue un rôle.

Des travailleurs isolés face aux enjeux de la protection sociale risqueraient de voir leur protection s’amoindrir, faute de poids dans la négociation, mais aussi car leurs besoins de court terme risquent de les amener à limiter leur abondement à des formes sociales d’assurance. Le risque est donc qu’un pourcentage toujours plus grand de personnes bénéficie d’un simple filet de sécurité, nécessaire mais insuffisant. 

Par-delà ces considérations, la CFTC estime que les entreprises sont bien placées pour s’adapter à l’évolution des besoins des salariés et mieux prendre en compte les risques sociaux : l’échelle de l’entreprise est la plus à même de répondre au besoin de personnalisation de la protection sociale voulue par les assurés.

Ces derniers attendent des organismes de protection sociale qu’ils comprennent et anticipent les évolutions de la société, et qu’ils répondent à leurs besoins particuliers. La variété croissante des situations s’accorde mal avec des prestations standardisées. Les formes de statuts des travailleurs sont de plus en plus diverses, les trajectoires personnelles et familiales également et leurs aspirations tout autant. L’attente au regard de l’innovation et d’une diversification et d’une individualisation des offres de prestations requièrent des contrats sur-mesure, négociés à l’échelle de l’entreprise ou des branches, adaptés aux différents profils des salariés et à leur situation personnelle. Pour ces raisons, la CFTC défend le modèle français de protection sociale, impliquant fortement les entreprises et le travail, par le système des cotisations.

Au-delà des risques traditionnels, les entreprises ont un rôle important à jouer pour promouvoir l’emploi des seniors et accompagner les aidants.

o L’allongement de l’espérance de vie et les récentes réformes des retraites ont eu pour conséquence de faire cohabiter plusieurs générations au sein d’une même entreprise. Si les entreprises doivent continuer à recruter des jeunes pour insérer cette population qui s’est sentie parfois marginalisée pendant la crise sanitaire, elles ne doivent pas succomber à la tentation habituelle de se délester des séniors. Ce n’est qu’ainsi que se relèvera le défi intergénérationnel auquel les entreprises sont confrontées. Or, l’on constate que pour s’ajuster aux conséquences de la crise, nombreuses sont celles qui détournent tous les dispositifs possibles pour favoriser les départs en pré-retraite.

A la CFTC, nous estimons qu’au contraire elles doivent intensifier la formation continue auprès des séniors, pour les armer en compétences face à l’accélération des mutations technologiques. Ne pas accéder à la formation, c’est aujourd’hui être exposé à un risque social : celui de voir ses compétences rapidement dépassées sur le marché du travail. 

Les entreprises peuvent aussi développer le mécénat de compétences. La CFTC souhaite promouvoir l’emploi à temps partagé en faveur d’activités de bénévolat ou relatives à l’économie sociale et solidaire. Le principe est simple : partager son temps entre son emploi et une association tout en restant rémunéré à 100% par son entreprise. Les entreprises ont à préparer le passage à la retraite en évitant le passage brutal de la « pleine » activité à la « pleine » retraite. 

o Les aidants ont été particulièrement sollicités pendant le premier confinement. Aujourd’hui, seules 15% des entreprises jugent que le salariat spécifique des aidants doit faire l’objet de discussions entre partenaires sociaux. Les quelques expérimentations et accords concernent principalement des grands groupes. En effet, pour la majorité des dirigeants, cet engagement relève de la sphère privée.

Pourtant, un aidant sur cinq déclare que son activité d’aidant a eu des répercussions sur sa vie professionnelle, notamment en refusant une mobilité géographique ou en déclinant une promotion. La CFTC a produit une contribution pour repenser la prise en charge de la perte d’autonomie et l’aide aux aidants. Chacun doit prendre sa part : Etat, collectivités locales, associations, entreprises, pour repérer, prévenir et accompagner les aidants. Les entreprises peuvent former les salariés aidants pour leur permettre d’acquérir les compétences nécessaires à leur engagement, et sont tenues d’adapter leur organisation du travail pour veiller à la santé des salariés aidants. Le télétravail à cet égard est un puissant levier de conciliation des temps de vie.

Crédit photo Une : Bernard Gouédard

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