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Continental à Sarreguemines : quand les salariés plébiscitent la CFTC

10 janvier 2020 | Visages du syndicalisme

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Plus de 45 % ! C’est le score obtenu par la CFTC au sein de l’usine Continental France de Sarreguemines, lors des élections CSE. Voici l’histoire d’un syndicat dynamique et qui n’a pas peur de se remettre en question.

Le site de Continental France à Sarreguemines, dans la Moselle, emploie 1 500 salariés. Du 4 au 8 octobre 2019 s’y tenaient les élections pour le comité social et économique : la CFTC y remportait 45,11 % des voix face à quatre autres syndicats. En 2015, elle y faisait déjà 33,3 % – un score plus qu’honorable – qui a néanmoins connu une fulgurante progression. Loin de provenir d’un coup de baguette magique, ces résultats sont le fruit d’un travail sérieux, constant… Et d’une réelle éthique comme nous le confient les membres de la section.

« Première des règles, la droiture »

Selon Jacques Siebert, le président du syndicat CFTC de l’usine, le congrès de la fédération CMTE (Chimie, Mines, Textile, Énergie), à La Rochelle (en 2011), a constitué un tournant. Les débats ont entériné une nécessaire professionnalisation du syndicalisme face aux nouveaux défis. « Le syndicat CFTC Continental s’est doté d’un règlement intérieur strict, a organisé des réunions suivies de comptes rendus avec beaucoup de régularité, poursuit-il. La première des règles que nous nous imposons est celle de la droiture.  Servir la CFTC et ne pas s’en servir, avoir le sens du Bien commun. C’est à cette condition que nous pouvons obtenir la reconnaissance des salariés et c’est à cette condition qu’on intègre la section, ponctue-t-il avec conviction. C’est une ligne très forte, c’est la base de tout. »

Autour de lui, Mustafa Babacan, trésorier, et Jonathan Ehresmann, secrétaire, approuvent avec force. « Ma préoccupation, dit encore Jacques, est de mettre en place une équipe opérationnelle et de lui transmettre ces valeurs de partage et de droiture… C’est l’objectif avant de me retirer, de partir à la retraite. » Et cela semble en bonne voie. Lors du Congrès confédéral de Marseille, Mustafa était le porteur de mandat. 

Un bel accord préélectoral

« L’honnêteté, c’est fondamental chez nous. Encore faut-il que ça se sache. Il s’agit de montrer notre travail et notre rigueur. Tourner la page avec le « syndicalisme de grand-père » », complète Jonathan avec lucidité. Informer en somme. D’où l’accent mis, en amont des élections, sur la communication auprès des 450 adhérents : prise en main du numérique avec l’e-mail « La Brève du CE » au lendemain des réunions et la création d’un groupe Facebook ; flyers sur le CSE ; tombola 100 % gagnants avec des lots assurant la diffusion du logo ; lettre trimestrielle du président. D’où, encore, la recherche de futurs militants – et surtout militantes – ainsi que la rédaction d’une brochure électorale de 12 pages, faisant la pédagogie de la nouvelle instance CSE auprès des salariés. D’où, bien sûr, le travail intense qui a entouré l’accord préélectoral – 12 réunions préparatoires ! « Nous avons négocié pas à pas pour obtenir 19 représentants de proximité, 12 membres de commissions dont l’une dédiée à la santé, à la sécurité et aux conditions de travail, un trésorier adjoint, un secrétaire adjoint, un crédit d’heures plus important que le précédent toutes fonctions cumulées, qui veille à faire la part belle au rapporteur et à dégager un temps spécifique pour le fonctionnement du bureau… C’est un bel accord ! Nous en sommes plutôt fiers », commente Jacques.

« Copié-collé, jamais égalé »

À l’issue du scrutin, la CFTC obtient 9 sièges sur 20 de titulaires au CSE (contre 6 précédemment) et 3 membres dans toutes les commissions. « Ce qui s’est passé en 2015, explique Mustafa, c’est que, face à la progression déjà forte de la CFTC, les autres syndicats ont fait alliance. Nous laissant moins de place dans les commissions que celle normalement convenue. Mais là, avec 45 % des suffrages, les salariés se sont clairement exprimés : c’est nous qu’ils veulent voir à la manœuvre ! »

« Ils ont montré leur accord avec notre ligne, ajoute Jacques. On souhaite emmener l’entreprise le plus loin possible, avec le maximum de salariés à bord. Mais pas dans n’importe quelles conditions… Négocier, oui. Ça ne signifie pas tout accepter. » Une ligne de conduite claire, dans un contexte sensible. L’introduction du pneu asiatique sur les marchés européens a fait baisser le volume des ventes de plus de 5 %… soit 7 millions de pneus de moins en Europe ! Des répercussions, il y en aura forcément. La CFTC entend demander lesquelles à la direction. « Notre stratégie est toujours réfléchie, collégiale. Chaque décision quant à l’action à entreprendre est le fruit d’un vote, précise Jacques. Et chacun dispose d’une voix, quel que soit son mandat. C’est cela la démocratie. » Voilà qui contribue certainement à la « différence » perçue par les salariés entre la CFTC et les autres organisations. C’est d’ailleurs le slogan du syndicat, depuis 10 ans. « Tous les concurrents veulent faire du « CFTC », renchérit Jonathan. On est copié-collé sans cesse, mais jamais égalé. Car cela nous oblige à nous remettre en cause, à nous interroger sur nous-mêmes, à cultiver notre différence. On avance donc plus vite ! » 

C’est une rencontre, comme souvent, qui a permis à Jonathan de découvrir la CFTC. Celle du regretté Pierre Rubeck, ancien président du syndicat, élu conseiller confédéral lors du Congrès de Vichy, quelques jours avant sa disparition. « C’était un grand ami, il venait nous voir sur les machines. On fonctionne grâce à son impulsion, confie Jonathan. Lorsque Pierre nous a quittés, on nous donnait perdants dans l’usine. Nos premiers résultats, on les lui a dédicacés. On a une photo de lui dans le local syndical. Et ce plébiscite des salariés, c’est le plus bel hommage que l’on puisse lui rendre ! »

 

Maud Vaillant

Crédit photographique : Bernard Gouédard
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