Guide méthodo (3/3) : quelles dispositions prévoir dans les accords Covid-19 ? [MàJ 13/05/2020]
22 avril 2020 | Vie pratique
Plusieurs entreprises ont négocié avec leurs délégués syndicaux des accords, appelés communément les accords “Covid 19”. Parmi les thématiques phares de ces accords particuliers, nous trouvons la mise en place de l'activité partielle, la durée et l'organisation du travail, les congés, le télétravail. Ces accords peuvent aborder une seule de ces thématiques ou plusieurs d’entre elles.
Lire aussi :
- Guide méthodo (1/3) : mode d’emploi pour le CSE en période de pandémie
- Guide méthodo (2/3) : négocier un accord d’entreprise en période de Covid-19
La première spécificité de ces accords tient au fait que chaque entreprise doit réaliser du « sur-mesure ». Il ne peut exister d’accord “clé en main”, standardisé, pour trouver à s’appliquer dans toutes les entreprises. Il s’agit de répondre aux impératifs économiques et sociaux précis d’une entreprise donnée.
La deuxième spécificité réside dans le fait que les mesures négociées et mises en place par ces accords devront, pour être efficaces, faire l’objet d’une vaste communication, d’une explication et d’un suivi régulier.
I. Construire un accord “Covid-19”: Les mesures à prévoir dans tous les accords quelle que soit la thématique abordée
1. Négocier en adéquation avec les besoins :
Les accords Covid-19 sont de nature à répondre aux conséquences de la situation d’urgence sanitaire.
Ce préalable à toute négociation doit bien être en tête. Il s’agit d’éviter que les entreprises utilisent les dispositifs dérogatoires ouverts par les ordonnances concernant la crise sanitaire comme un effet d’aubaine. Il faut s’assurer que ce que les ordonnances autorisent, est bien nécessaire dans l’entreprise. L’autorisation de déroger n’est pas une obligation. Si les adaptations ne sont pas nécessaires, elles ne doivent pas être mises en place.
2. Négocier des accords de courte durée
Les accords Covid-19 sont de nature à répondre à une situation temporaire. Ils ont vocation à aborder des points qui n’auront qu’une application très limitée dans le temps.
Souvent les accords sont conclus pour la durée maximale ouverte par les ordonnances à savoir jusqu’au 31 décembre 2020. Ce délai laisse un pouvoir très important de flexibilité pour l’entreprise au détriment éventuel des salariés.
Pour la CFTC : il est nécessaire de distinguer deux temps pendant la crise sanitaire:
- Les accords dits de « gestion du confinement” doivent comprendre des mesures spécifiques et nécessaires pour une durée d’au plus trois mois avec possibilité de revoir l’accord pour l’adapter.
- Les accords de gestion de la période post confinement : La situation sanitaire et économique est très évolutive, il convient donc d’être vigilant aux conséquences, en termes de contraintes et de sacrifices imposés aux salariés au-delà du nécessaire. Il nous paraît déraisonnable de disposer dès à présent pour une période sur laquelle aucune entreprise n’a de visibilité. Les accords qui prévoient des mesures sur le long terme devront donc être négociés dans un second temps, au moyen d’avenants ou nouvelles discussions à ouvrir.
3. Organiser les modalités de suivi de l’accord :
Cette période particulière appelle plus que jamais un dialogue social efficace et adapté ainsi qu’une communication permanente pour assurer un suivi très régulier, voire quasi quotidien, de la situation dans l’entreprise. Il convient de prévoir des réunions dans une temporalité rapprochée avec la direction dans l’accord (hebdomadaire, bimensuelle, mensuelle…). Les modalités de suivi entre l’employeur et les délégués syndicaux sont à définir dans l’accord. Les facilités de communication ouvertes par les ordonnances COVID 19 avec la visio-conférence, les conférences téléphoniques et les messageries instantanées facilitent les modalités de suivi (cf. notre guide méthodo « négocier un accord » : https://www.cftc.fr/actualites/guide-methodo-2-3-negocier-un-accord-dentreprise-en-periode-de-covid-19).
4. Organiser les modalités de communications dans l’accord
Si vous n’avez pas négocié un accord spécifique aux modalités de communication pendant la période de crise sanitaire ou si vous n’avez pas d’accord au sein de l’entreprise les régissant, il faut absolument les définir dans l’accord que vous allez négocier.
Pendant cette période particulière, il est nécessaire d’instaurer un pont de communication entre la direction et les élus, mais aussi entre les élus et les salariés. Rien ne vous en empêche d’organiser ces modalités de communication dans un accord d’entreprise, quelle que soit la thématique de l’accord, en dispositions complémentaires ou en accord spécifique.
Parmi ces dispositions vous pouvez envisager :
- Des modalités de contact mise en place entre les représentants du personnel et les salariés (intranet, plateforme téléphonique etc.)
- Des mesures de lutte contre l’isolement,
- Une plateforme employeur/ organisations syndicales pour aider aux démarches administratives des salariés avec des interlocuteurs dédiés.
- L’élaboration d’une newsletter à destination des salariés etc.
Ce que l’on constate dans la pratique :
Les accords de mise en activité partielle ne prévoyant pas de modalités de communications sont les plus problématiques, car les élus se retrouvent confrontés à un arrêt brutal de la communication comme corollaire de l’arrêt de l’activité de l’entreprise. Il est donc nécessaire de prévoir des points réguliers d’information pendant toute la durée de la mise en activité partielle dans l’entreprise, pour assurer le suivi de la situation des salariés et anticiper la reprise de l’activité.
II. Les mesures à prévoir dans les accords selon les thématiques abordées :
1. Les accords sur le télétravail version “Covid 19″
Avec le confinement obligatoire, le télétravail s’est développé de façon massive. Or, toutes les entreprises n’avaient pas négocié sur le sujet. Certains accords sont parfois négociés postérieurement à la mise en télétravail effective des salariés. Les entreprises doivent donc l’organiser en urgence ce qui nécessite une co-construction avec les partenaires sociaux. La question des risques psychosociaux et des mesures de lutte contre les effets de l’isolement doit être appréhendée car le télétravail se met en place de façon durable sans possibilités de réunir le collectif de travail. On peut définir 3 grands axes qui peuvent faire l’objet de dispositions dans un accord :
a) Définition des plages et horaires de travail
Afin de concilier les temps de vie professionnelle et personnelle, il est nécessaire de définir des plages horaires de travail et des plages de contact possible avec le salarié. Il convient également d’avoir à l’esprit que le télétravail tel que pratiqué à l’heure actuelle est différent du télétravail habituel puisque le confinement impose la présence de toute la cellule familiale au domicile et notamment la présence des enfants et le suivi de leur scolarité.
Il faut donc que le télétravail mis en place concilie cette contrainte en terme de plages horaires et de charge de travail.
b) Définition des modalités organisationnelles et mise à disposition du matériel nécessaire
On peut par exemple recommander aux salariés de définir, dans la mesure du possible, un espace de travail dédié dans une pièce dédiée quand cela est possible et d’aménager leur poste de travail de manière à être bien installés (chaise confortable, hauteur de la table…). Une mise à disposition, par l’employeur, d’informations, de formation, ou d’assistance à distance pour l’utilisation des outils informatiques ainsi que des conseils en ergonomie est indispensable.
Attention : Du fait d’une mise en place dans l’urgence du télétravail dans nombre d’entreprises, certains salariés n’ont pas de matériel informatique fourni par l’employeur et utilisent (parfois même en partage avec d’autres personnes de la cellule familiale) leur propre matériel.
Dans le guide pratique télétravail publié par le ministère, il est indiqué que le salarié peut utiliser son matériel personnel s’il le souhaite, mais l’employeur est tenu de fournir le matériel nécessaire pour travailler à distance si le salarié en fait la demande.
c) Définition des modalités de contact avec l’entreprise, les collègues et les managers
Les managers doivent aussi réguler la charge de travail de leurs collaborateurs, en faisant régulièrement le point avec eux. Il s’agit de prévenir la surcharge de travail et la sur-sollicitation de certains salariés. Mais aussi la sous-charge et l’isolement d’autres salariés, du fait de l’arrêt de certains projets. Ce management à distance nécessite aussi des temps collectifs afin de redéfinir les objectifs et les moyens.
Cela peut être des réunions courtes et régulières en visioconférence pour faire le point sur l’activité.
A noter : Ne pas oublier de mentionner dans l’accord les modalités de contacts entre les élus et les salariés !
Bon à savoir : Les salariés en télétravail bénéficie du maintien des tickets restaurants.
2. Les accords mettant en place l’activité partielle
Les retours que nous avons s’agissant du passage en activité partielle témoignent du fait qu’elle est souvent mise en place unilatéralement par l’entreprise après consultation du CSE. S’agissant des mises en activité partielle débutées dès le début du confinement (notamment pour les entreprises qui avaient obligation légale de fermer), le temps a manqué pour négocier un accord. Les entreprises qui ont négocié des accords sont plutôt les entreprises de taille importante et celles qui ont mis en place l’activité partielle à compter de la fin du mois de mars. Les accords sur l’activité partielle s’accompagnent souvent de dispositions relatives à l’utilisation des congés payés et autres repos conventionnels.
Parmi les points notables de ces accords figurent les mesures permettant de tendre vers un maintien de la rémunération :
a) Pour les entreprises avec trésorerie suffisante, maintien total de la partie du salaire non prise en charge par l’activité partielle. Cette mesure est encouragée du fait de l’exonération de charges sociales et fiscales pour la partie maintenue.
Ex. de clause de maintien de salaire
“Conscient des difficultés financières que pourraient entrainer le dispositif d’activité partielle en application des dispositions légales prévoyant le versement d’une indemnité correspondant à 70% du salaire brut de base. Les partenaires sociaux et la direction décident que l’activité partielle est compensée à hauteur de 100% du salaire net, calculé sur la base d’une assiette brute servant de calcul à l’indemnité de congés payés dans le cadre de la règle du maintien de salaire du 18 mars jusqu’au 31 mai. ”
b) Possibilité de compléter le salaire par la pose de congés, le recours au compteur CET et RTT avec accord du salarié ce système peut permettre de retarder l’entrée dans le dispositif de l’activité partielle.
Conseil CFTC : Si l’employeur refuse le maintien de la rémunération, vous pouvez dans le cadre de la négociation obtenir en contrepartie qu’il n’oblige pas les salariés à solder des jours de RTT ou CET sans leur accord, et qu’il ne leur impose pas une date de prise de ses congés.
c) Mise en place d’un système qui permet de maintenir les rémunérations des salariés à temps partiel, apprenti, titulaire d’un contrat de professionnalisation ou des bas salaires de l’entreprise en fonction un plafond. Cela permet de maintenir les plus bas salaires. Le montant est à définir dans l’accord (aux alentours de 1,5 SMIC mensuel brut par exemple).
d) Pour les entreprises ayant des primes fixes conventionnelles tel que le 13 ème mois, possibilité d’avancer la date de versement d’une partie de la prime pour compenser la perte de salaire.
Ex. avancement date versement de la prime
“…la direction versera par anticipation une avance sur la prime annuelle d’un montant forfaitaire maximum de 300€ sur la paie du mois d’avril, sous réserve de la capacité du service de paie à réaliser les paramétrages dans les délais requis.”
Autres points à négocier dans les accords :
- Profiter de ces temps de confinement pour mettre en place des mesures de formations comme le e-learning qui permet de maintenir l’employabilité du salarié et de le faire monter en compétence ;
- Mise en place de modalités de contact ”anti isolement ” entre les élus et les salariés ;
- Possibilité de suspendre les clauses d’exclusivité présentes dans les contrats de travail, pour permettre aux salariés qui le souhaitent et le peuvent de travailler dans les entreprises qui exercent les activités essentielles à l’économie ;
- La rémunération des heures de délégation peut aussi être abordée dans l’accord en l’absence de législation claire en la question.
- Clause de suivi entre la direction et les élus avec des réunions en visioconférences pour évaluer la situation entre les élus et la direction. Il faut éviter le “silence radio” de la direction après la mise en place du chômage partiel.
Ex. modalités de suivi
Art…… Suivi de l’accord avec les organisations syndicales représentatives :
Une commission de suivi du présent accord, composée de la direction et des délégués syndicaux de chaque organisation syndicale représentative, est créée.
Elle se réunit toutes les deux semaines pendant la période d’activité partielle afin notamment d’échanger sur :
- La situation sanitaire et son évolution ;
- Les modalités de reprise d’activité ;
- L’état des lieux des volumes de recours à l’activité partielle et les évolutions possibles ;
- Les difficultés qui seraient rencontrées au niveau individuel et le suivi des mesures gouvernementales (réglementation, cas pratiques pour les arrêts garde d’enfants).
3. Les accords relatifs à la prise de congés
Les accords relatifs aux congés version Covid-19 ont souvent comme objectif pour les entreprises de solder les compteurs pendant cette période de confinement et de s’assurer que les salariés seront disponibles à la reprise de l’activité. L’utilisation de ces soldes permet aussi de retarder l’entrée dans des dispositifs de l’activité partielle notamment en présence de crédits de CET, journées de repos conventionnel ou RTT conséquents. Les dispositions relatives aux congés et repos peuvent accompagner un accord mettant en place l’activité partielle. Elles poursuivent un objectif commun qui est de faire face à une baisse d’activité. Ce sont donc des mesures complémentaires que les entreprises envisagent souvent ensemble.
a) Sur les congés payés : la possibilité de négocier des mesures dérogatoires
Un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, de branche, peut autoriser l’employeur à imposer la prise de congés payés, dans la limite de 6 jours ouvrables (5 jours ouvrés). L’employeur doit respecter un délai de prévenance d’au moins 1 jour franc (contre 1 mois jusqu’ici).
Cette disposition vise tant les congés acquis, que ceux qui sont en cours d’acquisition (c’est-à-dire qu’ils pourront être pris avant même l’ouverture de la période de prise des congés). Ces jours pourront être fractionnés et imposés avant l’ouverture de la période de prise habituelle. L’accord peut aussi autoriser l’employeur à fixer les dates de congés sans tenir compte du droit aux congés simultanés des conjoints ou pacsés salariés de la même entreprise.
Que négocier dans l’accord ?
- Vous pouvez encadrer les situations dans lesquelles l’employeur pourra avoir recours à ces mesures et définir ensemble quels sont les évènements dans l’entreprise qui peuvent déclencher ce droit pour l’employeur, d’imposer les modalités d’utilisation de ses 6 jours. Exemples : reporter des congés du fait d’une commande exceptionnelle non prévue, faire face à un absentéisme imprévu de salariés (arrêts maladie) etc. Il faut essayer de déterminer un certain nombre de cas possibles et éviter les formules trop générales du type « nécessité de fonctionnement de service ».
- Prévoir un nombre de jours maximum inférieur à 6.
- Définir les périodes de CP concernées par ces mesures en laissant le choix aux salariés à l’intérieur d’une période calendaire donnée ou en donnant plusieurs choix possibles de périodes.
- Prévoir un délai de prévenance supérieur à 1 jour franc et préciser les modalités d’information des salariés ;
- Prévoir une durée d’application de l’accord plus courte que celle autorisée par la loi (ie jusqu’au 31 décembre 2020)
- Limiter les possibilités de fractionnement du congé principal ;
- Prévoir des garanties pour les conjoints ou salariés pacsés ;
- Prévoir des possibilités d’adaptation pour les salariés avec des motifs impérieux familiaux
- Prévoir un suivi particulier de l ‘application de l‘accord avec le CSE avec possibilité d’en revoir les modalités si besoin.
La solidarité avant tout
Prévoir des modalités solidaires pour les salariés touchés par le Covid 19 dans leur entourage :
Exemple : Les jours évènements familiaux que les salariés qui seraient confrontés au décès d’un proche pendant la période de confinement, et qui ne seraient pas en mesure de les prendre pour se rendre à la sépulture au regard des conditions actuelles, pourront demander à bénéficier des jours évènements familiaux correspondant, ultérieurement.
Cela peut aussi être une autorisation de poser des CP, ou autres jours de repos conventionnels en dérogation de l’accord.
b) Sur les jours de repos conventionnels, RTT, CET
Pour ces types de congés, les ordonnances n’imposent pas comme pour les CP un accord collectif, l’employeur pourra imposer ou modifier la prise de jours acquis de RTT, repos conventionnels et jours placés en CET unilatéralement dans la limite de 10 jours jusqu’au 31 décembre 2020. L’employeur doit respecter un délai de prévenance d’1 jour franc.
Conseil CFTC : La CFTC regrette qu’un accord collectif ne soit pas imposé au même titre que pour les congés payés. Nous conseillons fortement de demander à négocier des modalités dans le cadre d’un accord global qui aborderait les congés payés et les autres jours.
Les conseils de négociation et garde-fous pour en atténuer les effets sont les mêmes que pour les congés payés. Votre objectif est de veiller à ce que l’entreprise ne profite pas de façon opportune de ces dérogations pour disposer des congés de façon durable. Ce levier ne nécessite d’être mobilisé que pour organiser au mieux l’activité pendant la période de confinement et pour assurer une reprise optimale de l’activité de l’entreprise à l’issue de cette période.
Pourquoi pas créer un fond solidaire de jours ?
Un exemple trouvé dans un accord
Dans le contexte spécifique lié au confinement, les organisations syndicales ont, en accord avec la direction, pris en compte la situation particulière des collaborateurs dont l’activité ne leur permet pas de recourir au travail à distance ou résidant en zone blanche rendant impossible toute connexion et désireux de réduire leur présence sur site. La création d’un fonds solidaire de jours a été décidé. Dans ce contexte, tous les salariés en CDD ou CDI, sans condition de statut ni d’ancienneté peuvent contribuer au don de jours de repos. Le don s’effectue uniquement sur la base du volontariat, il est anonyme et définitif. Les jours pourront être donnés sur la 5e semaine de congés payés ; les jours RTT et jours de repos, les jours affectés sur le compte épargne temps.
4. Le recours au travail dominical et les dérogations à la durée maximale du travail
Certaines entreprises doivent faire face à une baisse conséquente d’activité alors que d’autres voient leur activité considérablement amplifiée dans des conditions difficiles pour les salariés.
L’ordonnance du 25 mars 2020 n°2020 – 323 est applicable depuis le 26 mars et jusqu’au 31 décembre 2020. Elle permet de déroger à la durée du travail.
Ce sont des dispositions destinées à permettre aux entreprises exerçant dans les secteurs essentiels à la Nation d’accroitre la durée maximale du travail, les modalités de recours aux heures supplémentaires ainsi que le travail dominical pour répondre à la forte demande.
a) Le travail du dimanche :
Il est élargi aux entreprises des secteurs jugés essentiels à la continuité de la vie économique et à la sûreté de la nation (dont la liste est fixée par décret). Il est aussi possible pour les entreprises qui assurent aux précédentes, des prestations nécessaires à l’accomplissement de leur activité principale. Là aussi ces dérogations sont valables jusqu’au 31 décembre 2020.
Il n’est pas nécessaire de négocier un accord collectif pour y recourir c’est une dérogation applicable directement. Bien entendu, si votre entreprise souhaite engager le dialogue social sur la question, un accord fixant les modalités sera toujours préférable à l’application stricte de la loi, notamment en prévoyant du volontariat.
b) Les durées maximales du travail
Dans certains secteurs jugés essentiels à la continuité de la vie économique et à la sûreté de la nation (dont la liste sera fixée par décret), l’employeur pourra déroger de manière unilatérale aux règles d’ordre public en matière de durée du travail, et aux stipulations conventionnelles applicables. Ces dérogations sont valables jusqu’au 31 décembre 2020.
Il pourra ainsi :
-
- réduire le repos quotidien à 9 h consécutives, sous réserve d’un repos compensateur équivalent à la durée du repos non pris. (Il est aujourd’hui fixé à 11h, sauf dérogation) ;
- porter la durée maximale quotidienne de travail à 12 h (elle est aujourd’hui fixée à 10 h, sauf dérogation) .
- fixer la durée maximale hebdomadaire moyenne à 48 h sur 12 semaines consécutives ou 12 mois pour certains exploitants ou entreprises agricoles (3) (elle est aujourd’hui fixée à 44h, sauf dérogation);
- fixer la durée maximale absolue hebdomadaire à 60 h (elle est aujourd’hui fixée à 48 h, sauf dérogation) ;
- fixer la durée maximale quotidienne d’un travailleur de nuit à 12 h, sous réserve de l’attribution d’un repos compensateur équivalent à la durée du dépassement (elle est aujourd’hui fixée à 8h avec droit à un repos équivalent, sauf dérogation) ;
- fixer la durée maximale hebdomadaire moyenne d’un travailleur de nuit à 44 h sur 12 semaines consécutives (elle est aujourd’hui fixée à 40 h, sauf dérogation).
Conseil CFTC : tout accord permettant de limiter ou d’encadrer le recours à ses dérogations ne pourra qu’être bénéfique pour les salariés. Il est nécessaire de prévoir dans ces accords les mesures de santé et de sécurité des salariés. L’intensification de la charge du travail et du temps de travail est incontestablement source de risque sur la santé du salarié.
Un accord permettant de revoir à la baisse les durées plafonds fixées par la loi, de privilégier le volontariat des salariés ainsi qu’une mise en place de mesure de prévention sur la santé des salariés est nécessaire. Par ailleurs, là aussi il faut absolument éviter les effets d’aubaines pour les entreprises et prévoir un suivi avec les élus du CSE.
A noter : N’hésitez pas à demander à votre entreprise un accord sur la prime exceptionnelle « Covid 19 » dont la vocation première est de soutenir les salariés qui sont en maintien d’activité notamment de ses entreprises dont l’activité est essentielle à la nation.
5. Accord sur la prime exceptionnelle d’activité
Dans le contexte de l’état d’urgence sanitaire lié à l’épidémie de Covid-19, le gouvernement améliore le dispositif de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, qui se prolonge jusqu’à fin août 2020. Même si l’employeur peut l’octroyer par décision unilatérale, un accord d‘entreprise est possible et même conseillé pour en fixer les modalités. Ce qu’il faut savoir sur cette prime :
Les salariés éligibles à la prime exceptionnelle Macron
Quel que soit leur type d’activité (artisans, commerçants, exploitants agricoles, professions libérales, exploitants agricoles, commerçants, artisans, professions libérales, mutuelle, syndicats professionnels, associations, tout organisme à but non lucratif, particulier employeur …), tous les salariés du secteur privé sont éligibles à la prime exceptionnelle.
Cela concerne aussi bien les salariés en contrat à durée déterminée, indéterminée, les contrats d’apprentissage et de professionnalisation, les contrats de chantier ou d’opération, les contrats de travail temporaire… A l’exception bien entendu des stagiaires qui ne perçoivent pas un salaire mais une gratification.
L’employeur peut décider de la verser à l’ensemble du personnel ou seulement à certaines catégories. Un salarié en arrêt garde enfant ou en télétravail est donc tout à fait éligible à cette prime. Cependant, l’ordonnance n°2020-385 du 1er avril 2020 précise que des conditions de travail liées à l’épidémie de covid-19 pouvaient être pris en compte pour moduler cette prime.
Il est donc possible de « distinguer les salariés qui doivent se rendre sur leur lieu de travail et les autres« , permettant ainsi aux employeurs qui le souhaitent de verser une prime plus importante aux salariés qui se déplacent jusqu’à leur lieu de travail à l’exemple des caissières, des transporteurs, des agents de sécurité par exemple.
Cette prime peut être versée jusqu’au 31 août 2020, les entreprises de moins de 250 salariés ne disposant pas d’un accord d’intéressement peuvent verser une prime exceptionnelle défiscalisée et exonérée de cotisations patronales, pouvant aller jusqu’à 1.000 euros par salarié. Cette limite est portée à 2000 euros pour les employeurs mettant en œuvre un accord d’intéressement.
Que négocier dans l’accord ?
Il vous appartiendra de définir avec l’employeur au-delà du montant de cette prime, les modulations en fonction de la situation des salariés en terme de conditions de travail face au covid.
Si vous ne souhaitez pas de hiérarchisation entre les salariés, l’attribution globale à tous est une option, si vous souhaiter minorer ou exclure de l’application de la prime des salariés « moins exposés à la pandémie » pour favoriser les autres salariés c’est possible également. Ce choix vous appartient en tant que délégué syndical selon ce que vous souhaitez porter dans cette négociation.
Conseil CFTC : Si vous optez pour une application avec modulation qui exclue ou minore la prime d’autres salariés comme ceux en télétravail par exemple, vous pouvez négocier d’autres mesures en échange :
-
- L’assurance que l’employeur ne pourra pas décider unilatéralement de l’utilisation des 10 jours pris sur les compteurs RTT, ou du CET par exemple.
- L’attribution d’un dédommagement forfaitaire pour les frais supplémentaires occasionnés par le télétravail (forfait internet, facture d’électricité etc )
Ex. frais télétravail
A titre exceptionnel et pendant la durée de cet accord, l’entreprise accepte de prendre en charge les frais occasionnés par ce travail à distance sur les jours de travail effectif et au prorata de la durée du travail effectif.
Cette prise en charge se fera sur note de frais validée par le manager pour les deux mois d’avril et de mai 2020, sur la base d’une prise en charge de 25€/mois pour les salariés en activité à 100% ou 15€/mois pour les salariés en activité à 50%.
Ce montant est proratisé en cas de mois incomplet et non rétroactif à la date de mise en travail à distance le 16 mars 2020. Cette prise en charge ne se cumule pas avec une autre prise en charge de quelque nature qu’elle soit et ayant le même objet, qui aurait pu être versée dans le cadre d’un autre accord.
- Vous pouvez aussi en plus de la prime octroyer aux salariés des jours de repos supplémentaires (à tous ou à une catégorie de salariés plus particulièrement concernés leurs conditions de travail du fait de la pandémie).
A noter : Cette prime peut être négociée dans le cadre d’un accord spécifique à la prime ou d’un accord covid global ou dans le cadre d’une NAO. Soyez vigilant, même si cette prime peut s’intégrer dans le cadre de la NAO salaire ou les négociations portant sur un accord d’intéressement, elle ne peut en aucun cas se substituer aux négociations sur les mesures salariales annuelles. L’entreprise pourrait opportunément bénéficier des exonérations fiscales et sociales auxquelles cette prime ouvre droit.
Focus : Le bénévolat solidaire !
Cette situation particulière n’est pas faite que de restrictions, elle permet aussi de mettre en avant la solidarité et le bien commun cher à la CFTC. Le bénévolat solidaire peut être mis en place dans vos accords Covid-19 n’hésitez pas à le proposer à vos directions dans vos négociations quelle que soit la thématique !
Exemple de mise en place dans un accord :
Chaque salarié qui le souhaite est encouragé à s’inscrire dans un dispositif de bénévolat solidaire dans le cadre des actions de l’appel à la mobilisation citoyenne.
Celles-ci peuvent prendre différentes formes :
Celles d’urgence nationale organisées par le ministère de la Santé :
- Aide alimentaire d’urgence
- Garde exceptionnelle d’enfants (personnel soignant)
- Lien avec les personnes isolées (téléphone, lien social)
- Solidarité de proximité (courses)
Celles réalisables à distance qui permettent de mettre ses connaissances et ses compétences au service d’une association (soutien scolaire ou amélioration de la logistique dans la distribution des repas par exemple).
ABONDEMENT EMPLOYEUR :
La direction, souhaite accompagner les collaborateurs voulant s’engager dans l’une de ces actions et pour cela abondera d’une journée « Absence autorisée/payée » lorsqu’un salarié posera un jour de repos pour participer à des actions de solidarité !