« On est sur la ligne de front », Isabelle, assistante maternelle et militante CFTC
1 avril 2020 | Visages du syndicalisme
Isabelle, 53 ans, est assistante maternelle depuis vingt-deux ans en Pays de la Loire, mais aussi référente bénévole CFTC. Si elle se considère « chanceuse » avec ses employeurs, elle assiste aussi à des situations… surprenantes.
Comment vivez-vous cette drôle de période ?
À titre individuel, je suis particulièrement bien lotie. J’ai de très bons employeurs, qui ont décidé de garder leurs enfants. D’habitude, j’en ai cinq, des périscolaires que je garde en fractionné, le matin, le midi et au goûter. Mais je ne travaille plus depuis mardi 17 mars, depuis le début du confinement, et je vais être payée en totalité, je suis vraiment chanceuse. En revanche, j’ai récupéré mes trois enfants, alors que deux ne vivaient plus chez moi. Mais comme ils sont au chômage technique ou partiel, ils sont revenus à la maison.
À quel genre de questions devez-vous répondre, en tant que référente CFTC ?
À deux types en particulier : sur la rémunération d’abord. Les assistantes maternelles ne savent toujours pas si elles vont être considérées au chômage partiel ou payées en intégralité, et ce, parce que tout dépend de leurs employeurs.
Le deuxième volet est un peu plus surprenant : des parents, qui travaillent à la maison, au bout d’une semaine de garde à domicile, demandent à mes collègues de reprendre les petits. Certains sont très clairs : ils souhaitent télétravailler… plus au calme ! Dans cette situation, certaines « ass mat » ne savent pas comment se comporter et agir ; « Qu’est-ce que je risque ? » est la question qui revient très souvent.
Que leur conseillez-vous ?
On est surtout là pour rappeler des points de droit. Pour leur rappeler qu’elles sont liées par un contrat de travail mais vu le contexte sanitaire actuel qu’elles ont la possibilité de refuser, qu’il n’y a aucune obligation d’accepter le retour des enfants. Certaines ont l’impression de ne pas pouvoir les accueillir convenablement, parce que fini les câlins et les bisous, parce qu’elles pensent plus à nettoyer qu’au reste. D’autres considèrent que les conditions de sécurité, et notamment sanitaires, ne sont plus conformes avec ce que prévoit leur agrément. Mais on doit aussi les informer qu’alors, les parents-employeurs, qui n’ont donc pas une activité « nécessaire à la vie de la Nation », peuvent les licencier. Facilement, qui plus est. On est sur la ligne de front, on n’est pas protégées et on a l’impression d’être interchangeables.