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La CFTC salue le renforcement de l’Europe de la Santé

13 novembre 2020 | Social

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L’épidémie a mis en évidence certaines faiblesses de l’Union européenne en matière sanitaire. Alors que le virus traversait les frontières sans encombre, l’absence de politique de santé européenne a conduit les Etats membres à agir de manière dispersée, parfois au détriment de la solidarité la plus élémentaire !

Le projet d’une union de la santé présenté par la commissaire européenne à la Santé Stella Kyriakides vise à remédier à cette situation. La CFTC salue cette évolution, d’autant plus que certaines des solutions retenues sont très proches de celles qu’elle-même proposait, au moment du Ségur de la Santé.

Que peut l’Union européenne face à une épidémie ?

Les affaires sanitaires relèvent des compétences nationales des Etats membres : il n’y a donc pas de politique de santé européenne. L’union européenne ne dispose sur ce plan que d’une “compétence communautaire d’appui”, c’est-à-dire qu’elle ne peut  qu’ »encourage[r] la coopération » et « complète[r] les politiques nationales« , sans s’y substituer (article 168 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne). Même en cas d’épidémie transfrontalière, elle ne peut pas décider seule de mesures de protection. Son rôle se concentre donc sur la coordination des moyens d’action. Elle peut se charger également d’informer et d’éduquer sur les problématiques de santé et de favoriser la recherche pour endiguer la maladie. C’est ainsi que la  Commission européenne a par exemple levé 140 millions d’euros de fonds publics et privés, le 10 mars dernier, pour contribuer à financer la recherche d’un vaccin contre le COVID-19. 

Pour l’essentiel, l’action de l’UE face à la pandémie a consisté en l’activation du mécanisme contre les menaces transfrontières graves pour la santé dans l’UE, mis en place en 2013 après l’épidémie de H1N1 de 2009.  Cette décision a permis à l’UE de :

  • planifier la réaction en mettant l’accent sur une coordination à l’échelle de l’UE afin de renforcer les différentes mesures nationales;
  • permettre la passation conjointe de marchés pour permettre aux pays de constituer des stocks de vaccins et de médicaments;
  • mettre en place des outils de surveillance épidémiologique ;
  • instaurer un système d’alerte rapide pour la notification, au niveau de l’UE, des alertes liées aux menaces transfrontières graves sur la santé, le «système d’alerte précoce et de réaction» (SAPR);
  • reconnaître l’existence d’une « situation d’urgence sanitaire » européenne pour accélérer la mise à disposition de médicaments, 
  • instituer un comité de sécurité sanitaire, composé de représentants nationaux, en vue d’échanger des informations, et de coordonner la réaction aux crises, ainsi que la communication avec le public et les professionnels de la santé.

Si ces mesures ont sans doute permis d’éviter le pire, la difficulté à réagir collectivement demeure particulièrement contre-productive dans le cas d’une crise sanitaire. On l’a vu avec le cas des masques et respirateurs, réquisitionnés par un pays au détriment d’un autre. Ou, plus récemment, au travers de l’impossibilité de s’entendre sur une définition commune de la quarantaine, ou une reconnaissance mutuelle de leurs tests.Ce type de réflexe peut contribuer à une détérioration de la situation sanitaire pour tous les habitants de l’UE. Il importe donc de chercher à garantir une plus grande homogénéité de la réaction.

Vers une europe de la santé

Afin de rendre possible une réponse commune et unie, la Commissaire européenne à la Santé Stella Kyriakides a proposé différents dispositifs fondant une réforme des compétences sanitaires de l’Union. 

  • L’amélioration de la communication et de la coopération entre les États membres : une nouvelle autorité, inspirée par la BADRA américaine (qui coordonne les efforts de recherche biomédicale) sera créée. 
  • La création d’une réserve stratégique en matériel médical pour pouvoir aider les États en fonction de leurs besoins.
  • La création d’une Union Européenne de la santé, disposant des moyens légaux pour déclarer un état d’urgence sanitaire à l’échelle de l’Union,
  • Le renforcement du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) habilité à évaluer la résistance des systèmes nationaux de santé (au moyen de stress tests), et à formuler en conséquence des recommandations

Cet ensemble de mesures devra être approuvé par les gouvernements des Etats membres ainsi que par les députés européens pour entrer en vigueur. Si la CFTC accueille favorablement ces mesures, elle regrette que seule la question d’une réserve stratégique soit évoquée en ce qui concerne l’approvisionnement, alors qu’une partie de la solution relève également de la relocalisation de notre industrie pharmaceutique.

Les propositions portées par la CFTC à l’occasion du Ségur de la santé :

(.pdf) Pour la CFTC, il faut améliorer les mécanismes de coordination des États membres face aux menaces transfrontières graves sur la santé (décision n° 1082/2013/UE). Pour la CFTC, cela passe par : 

  • Le renforcement juridique du « Comité européen de sécurité sanitaire » auquel est confié un rôle d’appui et de coordination pour les États membres (EM) et la Commission. Il doit disposer d’un pouvoir de sanction, notamment lorsqu’un EM bloque les ressources sanitaires destinées à un autre EM, comme ce fut le cas de la République tchèque vis-à-vis de l’Italie. 

  • L’amélioration de la communication entre les États membres. La CFTC souhaite que, lorsque survient une crise sanitaire, le Comité européen de sécurité sanitaire fonctionne sur le modèle du « Conseil scientifique » (France). Ce dernier propose des mesures avec des gradations selon l’impact de l’épidémie sur les EM et ces derniers se prononcent sur les propositions émises par le Comité européen de sécurité sanitaire. 

  • L’extension de mesures d’évaluation des risques et de coordination actuellement en vigueur pour les maladies transmissibles à toutes les menaces pour la santé, qu’elles soient d’origine biologique, chimique ou environnementale. Le Comité européen de sécurité sanitaire pourrait mettre en place des « stress tests » à l’image de ce qui a été institué pour la surveillance des systèmes bancaires et d’assurances après 2008. Un « stress test » virus pandémique permettrait de connaître la capacité de réponse de l’offre de soins au niveau national, mais aussi régional (certains systèmes de santé sont très décentralisés, comme en Italie et en Espagne). Les populations doivent connaître à l’avance la capacité d’accueil en termes de lits et d’équipements lorsque survient un tel risque. Les États membres qui « échoueraient » au « stress test » seraient ainsi poussés à adapter leur système de soins. 

  • La possibilité pour la Commission de définir des mesures transfrontalières d’urgence en cas de situation d’urgence particulière (mortalité ou hospitalisations à grande échelle). Lors de cette crise, les mesures nationales se sont avérées insuffisantes pour empêcher la 13 propagation de la menace. La Commission européenne devrait pouvoir décider des mesures transfrontalières d’urgence pour réduire la mobilité ou mettre en œuvre des transferts de patients d’un EM à un autre EM. 

  • Pour que la sortie de crise s’opère sur des bases saines, il faudra que les États membres de l’UE s’entendent sur le diagnostic et les faits. La CFTC suggère que le Comité européen de sécurité sanitaire crée une Commission d’experts indépendants vis-à-vis des États membres comme des institutions internationales (OMS), pour effectuer un retour sur expérience. De même, cette Commission d’experts indépendants doit se voir confier une mission de réflexion sur la prévention et la réaction rapide à ce genre de crise sanitaire, mais aussi sur l’organisation de la recherche au sein de l’Union européenne, la responsabilité de l’industrie pharmaceutique et les modalités de la relocalisation de sa production. Le Comité européen de sécurité sanitaire devra également diriger des travaux sur le risque des maladies infectieuses émergentes et son lien avec l’action de l’homme, à l’instar du travail du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).
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