Covid-19. « Ce système ne tient que par le bon vouloir de chacun », Eric, professeur et militant CFTC

Professeur d’histoire géographie dans un collège Réseau d’éducation prioritaire renforcé (59), Éric, 36 ans, vit placidement le confinement. Chargé de fournir à ses élèves un enseignement à distance, il s’accommode des dysfonctionnements et difficultés qui y sont liés.

En quoi consiste votre travail actuellement ?

On nous a demandé d’assurer une continuité pédagogique pendant ces semaines de confinement, et je pense que faute de mieux, c’est la bonne chose à faire. Il est important de garder le lien avec les élèves et leur famille. Normalement, je travaille treize heures par semaine, réparties sur mes quatre classes : deux 6e et deux 3e. C’est sûr que la charge de travail est bien supérieure actuellement. Mais nous sommes fonctionnaires d’État et tant que nous ne pouvons pas être en présentiel, il est normal de travailler ainsi.

Comment se passe votre travail justement ?

Je prépare des devoirs pour mes différentes classes et donne mes directives par téléphone ou par mail. En fait, c’est cette partie-là du travail qui prend le plus de temps : prenez une classe de 22 élèves, et cinq à dix minutes au téléphone à expliquer à chacun d’entre eux ce que je veux : vous y passez la matinée ! Mais ce n’est pas la seule difficulté.

Quelles sont les autres ?

La plateforme informatique, déjà, qui bugge de 9 h à 17 h. Par conséquent, il est difficile de recevoir les devoirs envoyés par les élèves. Ensuite, on se rend compte que beaucoup d’élèves doivent avoir une formation en informatique : s’ils discutent facilement via Snapchat, beaucoup ne savent pas envoyer un mail ! Il y a donc tout un apprentissage à faire. Enfin, cette situation met en lumière de grosses inégalités sociales : dans certaines familles, il n’y a qu’un ordinateur pour plusieurs enfants, avec des connexions approximatives. De ce fait, un tiers de mes élèves ne répondent pas. Je dois donc appeler les familles et faire confiance aux parents pour le suivi des devoirs. Ces derniers sont d’ailleurs en général ravis de nous entendre, de savoir que ce lien est maintenu. Ce système ne tient que par le bon vouloir de chacun.