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Exercer son mandat pendant la pandémie

24 mars 2020 | Vie pratique

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microtravail en france / Gaëtan Mortier

Le mandat d’élu au CSE ou de délégué syndical est-il suspendu quand l’entreprise est en activité partielle ou quand le représentant du personnel est en activité partielle ?

L’activité partielle n’a aucune incidence sur le mandat des représentants du personnel. Celui-ci se poursuit, seul le contrat de travail est suspendu. Les salariés se trouvant en activité partielle sont donc en droit, dans l’exercice de leurs fonctions représentatives, de pénétrer dans l’entreprise lorsqu’une partie des employés y travaillent encore.

Puis-je utiliser mes heures de délégation quand je suis en activité partielle ?

Le crédit d’heures est délivré en fonction du mandat et non du temps de travail effectif. L’absence du représentant du personnel n’a donc aucun impact sur le montant du crédit d’heures, quel que soit le motif de suspension du contrat de travail, y compris en cas d’activité partielle.

En revanche, n’hésitez pas à utiliser les possibilités de mutualisation des heures avec les suppléants, et ce, d’autant plus s’ils sont encore en activité dans l’entreprise. Il leur sera plus aisé de garder un contact avec la communauté de travail.

Puis-je utiliser les heures de délégation même si toute l’entreprise est fermée et que tous les salariés sont en activité partielle ?

Le code du travail et la jurisprudence ne donnent pas de réponse à cette question. Face à la situation inédite que nous vivons, la réponse n’est pas évidente et nous attendons des précisions du ministère du Travail sur ce point. Notre interprétation à ce stade est la suivante : si la pose d’heures de délégation est justifiée, par exemple la tenue d’une réunion CSE ou une négociation, cela nous semble possible.

Comment sont rémunérées les heures de délégation que je pose pendant l’activité partielle ?

Là aussi, il y a beaucoup d’incertitudes. En effet, la Cour de cassation semble faire une distinction entre les causes de suspension du contrat de travail pour maintenir ou réfuter les indemnités versées. Par exemple, en cas d’arrêt maladie, si le médecin n’a pas donné son accord pour poser des heures de délégation pendant l’arrêt, l’Assurance maladie est en droit de demander le remboursement des indemnités journalières perçues par le salarié protégé.

Concernant l’activité partielle, les juges ne se sont pas prononcés sur le maintien de la rémunération pour des heures de délégation alors que le salarié bénéficiait déjà de l’indemnité versée en raison de l’activité partielle. La seule précision qui existe sur la question est que l’employeur n’a pas le droit de déduire le temps passé en heures de délégation de l’indemnité versée au titre de l’activité partielle et doit verser la totalité de ladite indemnité.

Est-il possible d’obtenir un crédit d’heures supplémentaires en cette période ou les conditions de travail sont bouleversées ?

Le temps mensuel nécessaire à l’exercice de leurs fonctions par les représentants du CSE est fixé en heures par accord d’entreprise ou à défaut, par la loi.

Le code du travail prévoit que ce nombre d’heures peut être augmenté en cas de circonstances exceptionnelles.

A ce jour, nous considérons que la pandémie à laquelle nous faisons face et les conséquences pour les entreprises qui en découlent correspondent à des circonstances exceptionnelles permettant de dépasser le crédit d’heures habituel.

Je suis un élu en télétravail mais mon employeur refuse que je vienne dans les locaux de l’entreprise pour exercer mon mandat et voir mes collègues, je n’ai pas d’autorisation de déplacement signé par ce dernier, est ce légal ?

Peu importe votre situation (arrêt de travail, télétravail, activité partielle.) Le principe est celui de la continuité des mandats même en cas de suspension du contrat de travail. Mais la situation exceptionnelle dans laquelle nous nous trouvons, peut entraver son exercice. La priorité sanitaire reste le moins de présence physique donc l’employeur pourra alléguer de l’application de son obligation de sécurité pour refuser les venus des élus. Nous ne savons pas aujourd’hui si cela constituera une entrave ou pas, la situation étant inédite. 

Cependant nous considérons que concernant l’accès au locaux, si l’employeur maintient son activité en assurant la sécurité des salariés en poste, vous devez pouvoir accéder aux locaux en respectant les mêmes consignes de sécurité que les salariés présents. On pourra vous opposer certaines restrictions telles que les réunions collectives par exemple. L’employeur doit donc vous fournir une autorisation de déplacement.

Autre solution pour vous permettre de continuer à avoir contact avec la communauté de travailleurs que vous représentez, vous pouvez demander à l’employeur une solution de contact avec les salariés qui n’impose pas de présence physique. Vous devez être en mesure d’appeler ou écrire aux salariés et ces derniers doivent pouvoir vous joindre. A notre sens, si l’employeur a la possibilité de vous permettre de maintenir un lien à distance et qu’il le refuse, cela pourrait constituer une entrave.

La procédure de licenciement d‘un salarié protégé est-elle impactée du fait des restrictions règlementaires imposées pendant la pandémie ?

Les procédures de licenciements ne sont pas interdites ou suspendues pendant la pandémie.

Face à la situation, une instruction de la Direction générale du travail (DGT) en date du 17 mars 2020 adapte temporairement les modalités de mise en œuvre du contradictoire pour le traitement des demandes d’autorisation de licenciement ou de transfert du contrat de travail des salariés protégés, ainsi que pour l’instruction des recours hiérarchiques.

L’objectif est de limiter l’accès aux locaux administratifs et les contacts physiques liés notamment aux auditions et à la consultation des pièces, en privilégiant la voie écrite et le recours à la visioconférence.

L’entretien préalable à toute mesure de licenciement peut-il se tenir pendant la pandémie ?

Les procédures de licenciement ne sont apparemment pas suspendues de même que les délais de prescription ne semblent pas être changés. L’entretien préalable doit être considéré comme un déplacement professionnel pour motif impérieux ne pouvant être différé. L’employeur devra donc fournir une autorisation de de déplacement au salarié. Si la situation venait à évoluer avec des restrictions de circulations plus contraignantes, les règles applicables pourraient être changées.

D’autres difficultés juridiques subsistent. Ainsi une convocation d’un salarié à un entretien préalable de licenciement alors qu’il est en quarantaine pour cause de covid-19 ne nous semble pas être possible. L’entretien doit donc être reporté. A cela s’ajoute la suspension des services postaux rendant difficile l’envoi de LRAR.

Rappelons néanmoins que le gouvernement souhaite limiter le plus possible les licenciements et c’est la raison pour laquelle il a facilité et renforcé le recours à l’activité partielle.

Crédit photographique : Gaëtan Mortier
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