Droits de douane : comment riposter aux menaces de surtaxation américaines ?
22 juillet 2025 | Social
Mi-juillet, Donald Trump avait annoncé la mise en œuvre dès le 1er aout d’une surtaxe de 30 % pour les importations issues de l’Union européenne. Alors que le président américain multiplie les offensives douanières, l’UE réfléchit à une batterie de contre-mesures. Plutôt qu’une hausse générale des tarifs douaniers sur les produits américains, la CFTC défend le déploiement d’une réponse graduée et proportionnée, qui ciblerait des secteurs clés de l’économie américaine.
A partir du 1er aout, Donald Trump menace l’Union Européenne de la mise en œuvre de droits de douane de 30 % sur les importations en provenance de l’UE. Une surtaxation record : à ce jour, la plupart des droits de douanes américains fixés sur les biens en provenance de l’UE s’élèvent à seulement 10%. A ce titre, l’Union Européenne réfléchit à quelle serait la réponse adéquate, pour répondre à ces pratiques commerciales agressives.
Pour la CFTC, une nouvelle augmentation des droits de douane américains sur les importations européennes n’est pas envisageable. A titre de comparaison, le Royaume-Uni avait signé en mai dernier un accord douanier avec les Etats-Unis, qui prévoit un tarif de base de 10 % pour la plupart des biens britanniques exportés aux Etats Unis. Deuxième puissance économique mondiale à égalité avec la Chine, l’UE ne peut raisonnablement pas se satisfaire d’un accord commercial avec les Etats Unis qui serait plus défavorable que l’accord que les Américains ont passé avec le seul Royaume-Uni.
Cibler les droits de douane, plutôt que les généraliser
Conséquemment, l’Union Européenne doit envisager une riposte adéquate, en vue d’au moins maintenir la taxation douanière américaine de 10% actuellement en vigueur sur les importations en provenance de l’UE. A ce titre, rappelons d’abord qu’une hausse élevée des droits de douane américains pourrait être surtout contreproductive pour les Etats Unis. Du fait de l’imbrication des chaines de valeur (de nombreux biens produits sur le sol américain incorporent notamment des pièces et matières premières importées d’Europe), cette politique douanière pourrait mener le pays à une récession et accélérer l’inflation. Ces droits de douane pourraient donc être, dans la durée, difficilement supportables pour l’économie américaine.
Une augmentation disproportionnée de droits de douane des deux côtés de l’Atlantique n’épargnerait cependant pas les consommateurs européens, nos économies étant interdépendantes. L’UE ne doit donc pas non plus tomber dans le piège d’une surenchère douanière excessive, qui serait néfaste aux citoyens français et européens. Pour gagner ce bras de fer commercial, la CFTC estime que l’UE peut plutôt déployer une réponse graduée et proportionnée, qui ciblerait des secteurs clés de l’économie américaine. C’est d’ailleurs la stratégie que semble vouloir privilégier la Commission Européenne. Plutôt qu’une augmentation générique des droits de douane, celle-ci propose notamment de taxer davantage les importations américaines d’avions, de voitures, mais aussi certains alcools et produits alimentaires.
Mettre en œuvre une politique de préférence européenne
Relevons aussi que l’UE dispose d’instruments de réponse qui vont bien au-delà d’une simple hausse ciblée des droits de douane. A ce titre, la CFTC soutient notamment l’instauration d’une préférence européenne pour les biens industriels, qui serait fondée sur l’origine de fabrication des produits. Une préférence que l’UE applique déjà au cas par cas, en réponse à certaines pratiques commerciales, notamment celles de la Chine : Pékin excluant de ses marché publics les dispositifs médicaux fabriqués dans l’UE, l’Union européenne avait par exemple décidé mi-juin d’exclure les entreprises chinoises des commandes publiques de matériels médicaux de plus de 5 millions d’euros.
Globaliser cette préférence européenne pourrait ainsi revenir à viser l’accès aux marchés publics, mais aussi à l’ensemble des dispositifs publics (NDLR : les entreprises produisant davantage en Europe seraient par exemple prioritaires pour toucher des aides de l’Etat et de l’UE). Elle pourrait être mise en œuvre via ce qu’on appelle des clauses de contenu local : à titre d’illustration, l’Inflation Reduction Act – un loi adoptée aux USA en 2022 – prévoit que l’octroi de certaines aides puisse être conditionné au fait d’avoir un taux minimal de composants produits aux Etats Unis.
Trouver de nouveaux partenaires commerciaux
Enfin, si les Etats Unis choisissaient quoi qu’il arrive de maintenir une stratégique protectionniste très forte, l’UE peut aussi chercher à renforcer ses partenariats commerciaux (Japon, Inde, Amérique du Sud), afin de trouver de nouveaux débouchés. De ce point de vue, la possibilité de conclure un accord commercial avec le Mercosur, au terme d’une renégociation préservant davantage notre filière agricole, ne doit pas être écartée d’emblée.
L’époque de la mondialisation heureuse et naïve est révolue. La CFTC estime donc que des droits de douane ciblés sur certains secteurs (notamment en matière d’industrie) peuvent être pertinents. Notamment afin de favoriser une stratégie de réindustrialisation et de relocalisation de certaines activités, qui sont stratégiques pour assurer notre indépendance (santé, défense, etc…). Plutôt que la globalisation d’un protectionnisme aveugle, la CFTC croit davantage à l’émergence d’une mondialisation rééquilibrée, qui doit permettre à la France de retrouver davantage d’autonomie, dans certains secteurs et activités clés.
AC