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Congés payés : des souplesses autorisées à l’employeur moyennant négociation

30 mars 2020 | Vie pratique

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[MàJ 18/11/2020] Le Gouvernement a pris des mesures pour adapter le droit du travail à la crise sanitaire. Par ordonnance du 25 mars 2020 prise en application de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid 19 du 23/03/2020 (JO du 24/03/2020), le gouvernement prévoit des dispositions spécifiques en matière de congés payés, applicables depuis le 26 mars 2020. Les règles actuelles, légales et conventionnelles, s’en trouvent donc temporairement bouleversées (au plus tard jusqu’au 31/12/2020).

Ce que dit le droit

Ce que votre employeur peut imposer unilatéralement (sans qu’un accord préalable d’entreprise ou de branche soit nécessaire)

Imposer aux salariés de prendre au moins 12 jours continus et 24 jours ouvrables maximum de congé entre le 1er mai et le 31 octobre et les informer au moins 2 mois à l’avance de la période fixée dans l’entreprise pour la prise des congés et au moins un mois avant leur départ. Concernant l’ordre des départs, l’employeur doit tenir compte de la situation de famille, de l’ancienneté des salariés et de leur éventuelle activité chez d’autres employeurs (art. L 3141-16 C.trav.).

Imposer aux salariés de prendre la 5ème semaine séparément (entre le 1er novembre et le 30 avril)

Imposer aux salariés de solder leurs congés avant le 30 avril (sauf cas de report autorisés)

Modifier les dates de congés payés

– En l’absence de circonstances exceptionnelles, l’employeur doit respecter un délai de prévenance d’un mois avant la date de départ

– En présence de circonstances exceptionnelles, l’employeur peut modifier les dates de congé moins d’un mois avant le départ (art. L 3141-16, 2° C.trav.). Le Gouvernement considère que l’épidémie de coronavirus peut être considérée comme une circonstance exceptionnelle.
A noter ! Les circonstances exceptionnelles ne concernent que la modification des dates de départ en congé et non leur fixation.

• Imposer aux salariés la fermeture de l’entreprise

Attention ! Un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, de branche peut fixer une autre période (plus favorable) de prise des congés, d’ordre des départs durant celle-ci et les délais que doit respecter l’employeur s’il entend modifier l’ordre et les dates de départ. Ce n’est qu’à défaut d’accord que l’employeur peut en décider seul, la loi accordant une large place à la négociation collective dans ces domaines. Toutes ces dispositions existaient déjà avant l’ordonnance du 25 mars 2020.

> Lire le communiqué de la CFTC : Congés payés, durée du travail, et jour de repos : la CFTC veut négocier !

Ce qui doit être négocié au niveau de l’entreprise, ou à défaut, au niveau de la branche (nouvelles dispositions prévues par l’ordonnance du 25 mars 2020)

  • La prise de jours de congé à certaines périodes ou la modification des dates d’un congé déjà posé

L’article 1er de cette ordonnance permet à un accord d’entreprise ou, à défaut, de branche, d’autoriser l’employeur à imposer ou à modifier unilatéralement les dates de prise des congés payés. L’accord doit déterminer les conditions dans lesquelles l’employeur est autorisé à décider de la prise de ces jours de congé acquis par le salarié ou à modifier les dates de départ.

  • Le nombre de jours de CP concernés et le délai de prévenance

L’employeur ne peut disposer librement que de 6 jours ouvrables maximum (une semaine). Mais l’accord peut être plus favorable et fixer un nombre de jours inférieur. L’employeur devra le faire moyennant le respect d’un délai de prévenance d’un jour franc minimum qui peut être négocié à la hausse dans l’accord.

  • La période de prise de ces congés

La nouvelle disposition s’applique y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle les congés ont normalement vocation à être pris.

Pour rappel, les congés acquis en 2018/2019 ont habituellement vocation à être pris entre le 1er mai 2019 et le 30 avril 2020. Et les congés acquis en 2019/2020 ont habituellement vocation à être pris entre le 1er mai 2020 et le 30 avril 2021.

Selon le contenu de l’accord, l’employeur peut donc imposer/modifier des congés acquis en 2019/2020 :

  • sur la période de prise des congé en cours 1er mai 2020-30 avril 2021 (en réalité, jusqu’au 31/12/2020, date de la fin d’application des règles dérogatoires),
  • mais aussi sur la période précédente de prise des congés prenant fin le 30 avril 2020 (ou 31 mai si report prévu par la convention collective). 6 jours ouvrables maximum de nouveaux congés peuvent être imposés en plus du solde des congés 2018/2019 à prendre avant le 30 avril 2020.

Rappel ! La période de congés imposée ou modifiée peut s’étendre jusqu’au 31 décembre 2020.

Cela permet d’anticiper une adaptation de l’effectif de l’entreprise à son activité pour avoir un maximum de salariés lors de la reprise de l’activité durant l’été, notamment et d’imposer la prise de congés en période de moindre activité..

  • Le fractionnement des congés payés

Toujours moyennant l’existence d’un accord collectif, l’employeur peut également imposer le fractionnement des congés payés (du 13ème jour au 24ème jour du congé principal) sans être tenu de recueillir l’accord du salarié.

  • La suspension temporaire du droit à un congé simultané des conjoints ou des partenaires liés par un pacte civil de solidarité dans une même entreprise

Ce qui permettra au cas où la présence d’un des deux conjoints seulement est indispensable à l’entreprise, ou si l’un des deux conjoints a épuisé ses droits à congés, de dissocier les dates de départ en congés.

Questions / Réponses

Mon employeur peut-il m’imposer des congés durant la période de confinement ?

Oui, l’employeur peut vous imposer de solder vos congés avant la fin de la période de prise des congés qui prend fin le 30 avril 2020. Sauf cas de report prévus par la loi, la convention collective, la jurisprudence ou autorisés expressément par l’employeur, les congés non pris sont perdus.

Et oui, s’il s’agit des congés payés à prendre normalement en 2020/2021, c’est-à-dire sur la période de prise des congés en cours, mais à condition qu’un accord collectif signé dans votre entreprise ou dans votre branche l’y autorise. L’employeur peut vous imposer de poser des congés payés selon les modalités prévues dans l’accord (6 jours au maximum prévus par l’ordonnance du 25/03/20).

Mon employeur m’a prévenu deux semaines avant de mes dates de départ en congé. Puis-je les refuser car elles ne me conviennent pas ?

Oui car votre employeur n’a pas respecté le délai d’information conventionnel ou légal d’un mois sur l’ordre et les dates de départs. Il ne peut justifier le non-respect de ce délai par des circonstances exceptionnelles car ces dernières ne concernent que la modification et non la fixation des dates.

Il me restait 3 semaines à prendre avant fin mai que je n’ai pu prendre avant du fait d’une surcharge de travail et d’un manque de personnel ces derniers mois. Puis-je les reporter ?

L’employeur a l’obligation d’informer les salariés sur la période de prise des congés et sur l’ordre des départs afin de leur permettre de pouvoir prendre effectivement leurs congés et de le prouver en cas de litige. A défaut, il peut être condamné à réparer le préjudice subi. D’autre part, sauf hypothèse de report expressément prévue par les dispositions légales, une convention collective ou la jurisprudence, les congés payés non pris au cours d’une année donnée sont perdus. Leur report sur la période suivante ne peut se faire qu’avec l’accord exprès de l’employeur. Ainsi, si ce dernier ne vous a pas mise en mesure de prendre ces 3 semaines ou s’il s’y est opposé, le report peut, dans ce cas, est justifié.

Un accord a été signé dans mon entreprise autorisant l’employeur à nous imposer de poser trois jours de congés payés. Mon employeur m’a annoncé aujourd’hui jeudi que je serai en congé pour trois jours à compter de lundi. Est-ce normal ?

Tout dépend des termes de l’accord s’appliquant votre entreprise. L’ordonnance du 25 mars 2020 prévoit que l’employeur peut procéder de la sorte moyennant respect d’un délai de prévenance ne pouvant être inférieur à un jour franc mais votre accord a pu prévoir un délai supérieur. Il s’agit d’un délai de 24 heures qui commence à courir à 0 heure le lendemain du jour où vous avez été informée, donc il commencera à courir vendredi à 0 h et prendra fin 24 heures plus tard (donc vendredi à minuit). Ainsi le délai de 24 heures aura été respecté (vendredi) et vous pourrez être mise en congé à partir de samedi. Votre employeur est en règle dans le cas présent.

J’ai soldé mes congés pour la période précédente or mon employeur veut m’imposer pendant la période de confinement des congés que je devais prendre à partir du 1er juin pour partir cet été. En a-t-il le droit ?

A condition qu’un accord collectif signé dans votre entreprise ou dans votre branche l’y autorise, l’employeur peut vous imposer de poser des jours de congés payés acquis selon les modalités prévues dans l’accord. Cet accord peut prévoir que cette possibilité offerte à l’employeur s’applique y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle les congés ont normalement vocation à être pris. En ce cas, en effet, vous pouvez être contraint de poser dès à présent des jours que vous auriez posés normalement après le 1er juin (nombre de jours fixé dans l’accord et au maximum 6 jours).

J’ai posé des congés or ils tombent pendant la période de confinement, puis-je les supprimer pour pouvoir les reporter après ?

Cette demande peut être formulée auprès de votre employeur. Toutefois, même si les CP sont une obligation et un droit annuel au repos, à la détente et aux loisirs pour le salarié (jurisprudence constante de la CJUE et de la Cour de cassation), l’employeur est en droit de refuser ce report.

J’avais posé une semaine pour les vacances de Pâques qui avait été acceptée. Mon employeur m’annonce qu’il va reporter ces congés car il a besoin de ma présence à cette période. En a-t-il le droit ?

Moyennant l’existence d’un accord (établissement, entreprise ou, à défaut, branche) l’employeur peut être autorisé à modifier unilatéralement les dates de congé dans la limite de 6 jours, en respectant un délai de prévenance d’un jour franc. Donc oui, il peut reporter cette semaine accordée. Et même en l’absence d’accord, avant cette ordonnance, il pouvait déjà modifier les dates de départ sans respecter le délai habituel de prévenance d’un mois, en cas de circonstances exceptionnelles (art. L 3141-16, 2° C.trav.).

Mon conjoint et moi travaillons dans la même entreprise. Notre employeur peut-il nous imposer de ne pas prendre nos congés simultanément ?

Oui. Toujours moyennant l’existence d’un accord collectif, l’employeur peut suspendre temporairement le droit à un congé simultané des conjoints ou des partenaires liés par un pacte civil de solidarité et travaillant dans une même entreprise.

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