Suivez-nous

À la cristallerie de Saint-Louis, la CFTC se met au verre

1 juillet 2024 | Social

  • Partage

Fondée en 1586 dans la vallée de Münzthal en Moselle, la Compagnie des cristalleries de Saint-Louis est la plus ancienne cristallerie de France. Les salariés de cette manufacture historique – qui produisent à la main des objets de luxe pour les arts de la table, la décoration, les luminaires ou le mobilier – sont l’incarnation d’un savoir-faire artisanal unique, mais dont les processus de production sont appelés à évoluer. Parmi eux, Émeric Lecointre, lauréat en 2015 du titre de meilleur ouvrier de France, et élu l’année dernière représentant syndical CFTC.

Dans la vallée mosellane de Münzthal, voilà plus de quatre siècles qu’on célèbre un mystérieux mariage. Celui du sable et du feu. Ici, la Compagnie des cristalleries de Saint-Louis sculpte minutieusement le verre depuis 1586. Devenue « Verrerie royale » en 1767 sous Louis XV, la manufacture a sans discontinuer traversé les âges. Elle appartient aujourd’hui au groupe Hermès, qui l’a rachetée en 1994.

Une très longue histoire, qui est aussi celle d’Émeric Lecointre. Voilà plus de 20 ans que ce verrier – lauréat en 2015 du titre de meilleur ouvrier de France – officie dans ce qui constitue aujourd’hui la cristallerie la plus ancienne du pays. Depuis l’année dernière, il y fait aussi figure de représentant syndical CFTC. Dans une entreprise « en pleine métamorphose », qui se réorganise avec un nouvel atelier et un nouveau four, il s’agit pour les syndicats d’appréhender ces mutations, afin qu’elles puissent notamment répondre aux besoins des salariés concernés.

Moderniser la production, en protégeant l’activité des salariés

« A la CFTC, on a d’abord voulu rassurer les salariés, répondre aux inquiétudes liées aux changements d’organisation et de temps de travail », explique Émeric Lecointre. Lors des élections professionnelles d’octobre dernier, la CFTC a ainsi recueilli 38% des votes. Pour mieux appréhender ces transformations, la cristallerie peut s’appuyer sur le groupe Hermès, qui lui permet de se projeter plus sereinement dans l’avenir: « Ils ont une vision et une considération importante pour les salariés, c’est essentiel pour nous. »

Pour cette manufacture – prestigieuse mais déficitaire – bénéficier du soutien d’une entreprise puissante rassure. Les productions sont gourmandes énergétiquement, comme en main-d’œuvre qualifiée. Afin de diminuer les coûts, le levier le plus important reste l’outil de travail. C’est le sens des investissements dans un nouveau four, qui permettra à terme d’augmenter le volume de production. Les salariés devront toutefois s’adapter à ce nouvel outil, comme réorganiser leur temps de travail. À terme, Émeric Lecointre entrevoit notamment une légère automatisation de la production : « Une assistance mécanique n’est pas dénuée de sens et paraît indispensable pour pérenniser l’entreprise. Ce n’est pas plus mal sur certaines tâches, comme l’injection du verre, mais jamais la machine ne pourra remplacer l’essentiel de notre travail. »

Les dessous du verre

Un travail qui épouse d’abord la forme d’un artisanat collectif, fonctionnant en deux temps majeurs :« Dans le métier, on distingue le travail sur le verre à chaud, c’est-à-dire le soufflage et la mise en forme du verre, puis le travail sur le verre à froid, qui caractérise la valorisation de la pièce avec la gravure, la taille ou la dorure, précise Émeric Lecointre. Lui a longtemps évolué dans le verre à chaud, où l’on sculpte le verre. « Pour ce faire, nous sommes généralement quatre à intervenir successivement sur chaque pièce. L’un souffle le cristal, un autre apporte de la matière, un troisième va faire la jambe et le pied, puis une autre personne façonne le col. »

Aujourd’hui, Émeric a davantage une fonction d’encadrement « J’ai eu besoin d’autre chose que la production. Je suis devenu chef de place carafe et, depuis quatre ans, animateur de poste. Je contribue autant que possible à la passation du savoir-faire. J’aime beaucoup transmettre, inculquer les valeurs du travail, au-delà de l’apprentissage du métier. »

Miser sur la nouvelle génération

Si toute la production est réalisée à la main, la manufacture implique un travail à la chaîne, moins romantique que la représentation du souffleur de verre que peut se faire le grand public. En une journée, une équipe fabrique ainsi 60 carafes, ou entre 120 et 150 verres. Une production soutenue, que l’action syndicale doit nécessairement continuer d’encadrer, dans le sillage d’un renouvellement progressif des effectifs.

« Une nouvelle génération a rejoint la manufacture et elle s’identifie à des représentants plus jeunes, poursuit Émeric Lecointre. Des dizaines d’embauches sont aussi prévues dans les prochaines années. « Nous devrons être présents auprès de ces nouveaux salariés dès leur arrivée, pour leur expliquer en quoi un syndicat est utile au quotidien. Si vous n’allez pas voir un jeune, il n’ira jamais se syndiquer de lui-même. Il y a un besoin de dialogue, et avec cette nouvelle génération, il y a vraiment quelque chose à faire ! » Un dialogue social renouvelé, qui pourrait bien aider la Compagnie des cristalleries de Saint-Louis à distiller son savoir-faire, pour encore quelques siècles à venir.

Par Gaëtan Mortier, avec AC
Article repris de La Vie en bleu CFTC n°13, le magazine des adhérents CFTC

Actualités, ressources, ne manquez rien abonnez-vous à notre newsletter

Actualités, ressources, ne manquez rien…

Abonnez-vous à la newsletter !